Tant que le théâtre est en crise, il se porte bien ", assurait Jean Vilar à la fin des années 1960. Provocation, boutade de cet homme de théâtre ? Bien au contraire, comme le montre cet essai qui renouvelle l'histoire des spectacles et contribue, plus largement, à une histoire sociale, culturelle et politique de la nation.
Les discours autour de la " crise du théâtre ", qui trouvent leurs prémices au siècle des Lumières, se déploient particulièrement à partir des années 1890, en lien avec l'industrialisation du secteur et la concurrence d'autres formes de loisirs. L'auteure étudie les discours eux-mêmes, leurs auteurs, et les acteurs qui les véhiculent, mais aussi et surtout, leurs effets dans les pratiques.
Car ces discours, parfois mortifères et nauséabonds, puisant dans des registres pluriels –; moral, politique, esthétique, économique ou social –; ont profondément modifié les catégories de jugement, les répertoires, les comportements, les goûts des spectateurs et les politiques publiques.
L'auteure consacre ses recherches à la France, qui entretient des relations passionnées avec le théâtre, tout en esquissant des comparaisons avec d'autres pays européens.
Si ces discours de crise se sont ainsi perpétués, c'est aussi –; et tel n'est qu'un des nombreux paradoxes apparents de cette histoire –; parce qu'ils ont permis de forger une unité de groupe et de procurer une légitimité à ce petit monde, avant tout masculin, qui aime la controverse.
Ce livre permet ainsi d'éclairer sur la longue durée les questionnements actuels autour des sentiments déclinistes.