On parle bien d’éducation sentimentale ; pourquoi ne parlerait-on, au même sens, d’éducation philosophique ? L’esprit, non moins que le cœur, a son apprentissage, ses passions, ses égarements ou ses fidélités.L’esprit, c’est la mémoire. Non que penser soit se souvenir, comme le voulait Platon ; mais parce qu’une pensée oublieuse, comme est la science, est une pensée sans esprit ou sans âme.Ces quelques textes, divers quant à leur objet, ont en commun ce souci d’un passé : celui de l’auteur, celui des traditions qui l’inspirent, celui des maîtres qui l’ont formé ou qui le guident... L’esprit n’est pas une chose, c’est une histoire, et fidélité à cette histoire. Pour les individus comme pour les peuples, le passé de l’esprit, c’est l’esprit même.« Cela fait beaucoup de passé, dira-t-on, pour un homme jeune, et beaucoup d’esprit pour un matérialiste... » Mais c’est quand on est jeune qu’il faut cultiver la fidélité ; et quand on est matérialiste qu’il faut sauver l’esprit.C’est à peu près ce que ce livre raconte ou essaie d’expliquer.