Recul des projets collectifs et fin des grands récits, silence des intellectuels, mort du grand écrivain : ces images de déclin ne résistent pas à l’examen attentif des initiatives qui s’ébauchent aujourd’hui, L’idée d’une fin de l’engagement ne mérite en aucune façon de détenir le monopole. La figure du militant sacrifiant son existence à des lendemains qui chantent est certes révolue. Mais émergent ou se redéploient des pratiques qui renouvellent la citoyenneté, notamment autour d’enjeux culturels, sous des formes moins utopistes et tout aussi actives. L’individu contemporain s’engage, mais autrement : sans sacrifier sa subjectivité à une organisation ou à une idéologie. Un engagement qui autorise, en somme, le dégagement, telle pourrait être la formule de demain. L’avenir de l’engagement dépend de la capacité des acteurs à répondre à un défi crucial : comment favoriser la rencontre du bas et du haut, des mobilisations sociales ou culturelles et de l’intervention politique et intellectuelle ? Et avant tout, comment articuler les deux principales logiques de l’engagement : fermeté éthique et volonté active, raison et conviction ? Michel Wieviorka.